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Philosophie et élitisme (suite)

vendredi 2 février 2007, par lapholie


Il y a ceux qui sont pour la connaissance, et ceux qui sont en philo pour la pensée... Même en dehors du débat politique, les horizons sont bien divers... Ce qui me fais penser qu’il serait bien de reparler des objectifs de cette associations et d’ouvrir un peu les débats. Ne pas perdre de vue que nous sommes de moins en moins nombreux à emprunter cette voie, et que si ça continue comme ça on peut dire adieu au département ! Pour moi la priorité du débat c’est qu’est ce qui ne vas pas aujourd’hui dans l’enseignement de cette discipline qu’est la philosophie à l’université pour que le nombre d’étudiants baisse chaque année ? N’ y a-il pas une tendance au formatage pour les concours qui se retrouve dans la société au niveau de la normalisation et de la crétinisation de l’individu ? Tout ça peut bien sûr se traiter dans une question classique : qu’est ce que la philosophie ? Mais alors il ne faudra pas oublier de se poser la question aussi de la manière suivante : qu’est ce que la philosophie aujourd’hui ? Ne la considère-t-on pas à tort comme quelque chose d’immuable ? On va toujours puiser les réponses dans le passé ; or on cherche les réponses dans le passé quant on n’arrive pas à envisager de solutions pour l’avenir (cf. tendance de la société ajd, période nostalgique). C’est à l’avenir de la philo qu’il fait penser maintenant. On est dans une impasse à tous les niveaux. Or dans la pensée les impasses peuvent être levées. La philosophie pourrait se mettre davantage au service des problèmes et des questions qui se posent dans la société, à tous les niveaux, en travaillant en collaboration avec des organisations concrètes, comme il se fait déjà dans les commités d’éthique par exemple. Ressurgit alors la question : philosophie et politique. Je pense que le questionnement est toujours de part sa nature politique, mais pas au sens de savoir si oui ou non nous sommes pour le CPE. Ce qui est politique dans cette association, c’est avant tout d’avoir un projet, et se battre pour sa concrétisation, ça s’arrête là. Et quant on y réfléchit bien, c’est déjà beaucoup. Bon allez cette fois je mets un point final, bien qu’il y ait encore pleins de choses à dire, mais ça c’est aussi l’intérêt d’une assoc : lancer un pavé dans la marre de temps en temps et s’arrêter pour réfléchir. Tiens le "pavé dans la marre" ça sonne bien comme nom... non ? ok...

5 Messages de forum

  • Philosophie et élitisme (suite)

    2 février 2007 18:51, par morgane
    "La philosophie pourrait se mettre davantage au service des problèmes et des questions qui se posent dans la société, à tous les niveaux, en travaillant en collaboration avec des organisations concrètes, comme il se fait déjà dans les commités d’éthique par exemple." Je n’aime pas cette expression : "se mettre au service de". Tu te demandes pourquoi les rangs sont clairsemés en philo, mais c’est peut-être précisément parce qu’on a plus rien à faire soi-même. Il faut être assisté en philo comme on est assisté pour mettre ses courses dans son sac plastique à la supérette ? alors il faudrait montrer aux gens que, oui, il y a un rapport, que non, penser n’est pas inutile et bla, bla, bla. La phrase que j’ai le plus souvent entendue pendant mes années de lycée, c’était ’tu penses trop’. Je dis que s’ils se réveillent un jour, les gens qui en auront besoin comprendront à quoi sert la philo, tant qu’ils pensent que tout est la faute de la société, grand bien leur fasse, tant qu’ils pensent que tout ca, c’est l’oppression c’est le formatage (quand on sait qu’il existe, il suffit d’un geste pour y echapper : bruler son diplome) c’est l’expansion capitaliste ou le socialisme poussif (au choix), eh bah qu’ils se plaignent. Etre en colere c’est pas la meme chose que geindre. Et s’ils s’en moquent, va t on les forcer a prendre quoi, conscience ? Mais ils en ont une de conscience, et elle a décidé de pas s’en occuper. De ne pas s’occuper d’eux memes et de ne pas se demander si la question "qui es tu ?" merite une autre reponse que leur matricule, patrimoine, emploi. Bon, j’estime que s’acharner sur des gens qui se moquent de ce que vous dites c’est non seulement inutile, mais c’est humiliant. Je pense que c’est une autoregulation. Si toute pensée autre, c’est a dire si tout espoir s’eteint un jour pour eux, il devrait se produire quelque chose comme une reaction. Je ne crois pas savoir ou est le bien des autres, et c’est certainement pas en leur filant mes petites solutions de vie (va a la fac, tu vas voir on apprend des choses) que quelque chose va s’améliorer. Je crois que la philo, ca aide a faire comme un refuge, ou comme un gros bureau avec plein d’idées et plein de ressources dans lesquelles on peut aller puiser pour faire face a ces fameux problemes concrets politiques, sociaux etc. Mais c’est pas au bureau d’aller se mettre au service des gens, c’est a chacun de remplir ses tiroirs. Délivre moi des cartes ? mais non, délivre toi toi-meme enfin ! La liberté ne se donne pas, elle se prend (je ne sais plus ou j’ai pêché cette phrase). Tu parles de formatage des cursus, peut etre, mais apres ? Personne ne t’oblige a suivre tous tes cours, personne ne t’oblige a le decrocher ce diplome magique-qui-permet-de-travailler-et-donc-de-se-remplir-les-poches. Personne ne t’empeche de faire autre chose en meme temps. D’ailleurs, c’est peut etre plus facile de se libérer de cette tentation de se refugier dans un diplome et dans un devenir tout tranquille pour nous qui vivons dans un monde qui encourage ce genre de vies la. Par reaction, quoi. Et je me permets de dire que l’association de "compromis" et "féminin" ne me semble pas aller de soi. L’asso n’a donc qu’a vivre, a parler, je suis d’accord avec toi. Mais j’avais juste envie de reagir sur les mots.
  • Philosophie et élitisme (suite)

    2 février 2007 18:52, par jean-marc
    morgane, tu as raison, la liberté se prend et elle ne se livre pas dans un colis tout ficelé plug-and-play. En effet aller à la rencontre des gens qui se fichent de la philo ne va pas de soi. Pourtant je ne vois pas les choses exactement comme toi : les autres gens qui vivent dans notre beau pays et sur notre jolie planète ne me sont pas indifférents, car lorsqu’ils sont cons, ils me font chier. C’est pas seulement qu’ils ne connaissent pas la vie, qu’ils sont aveugles ou qu’ils passent à côté de l’essentiel : ces gens-là votent et choisissent les lois de mon pays, ces gens là font la guerre et développent des armes qui risquent de faire péter ma planète, et je subis d’ores et déjà leur pollution, leur violence, etc. Et il ne suffit pas de me dire que "je n’ai qu’à m’extraire de leur compagnie", je suis parmi eux et dans le même bateau. Pour moi, développer la philosophie, et au-delà, l’intelligence, la culture, la tolérance, la prudence intellectuelle (sic), ce n’est pas une action de bienfaisance ou de fierté, mais une question de vie ou de mort. Je ne veux pas de l’intolérance au pouvoir en 2007, et je ne me contente pas de voter, j’essaie de faire réfléchir autour de moi, et de faire penser. Il ne s’agit en aucun cas "d’être au service" de la société, mais de comprendre qu’il n’est pas indifférent pour moi que mes concitoyens soient éclairés ou teubés. D’ailleurs, je suis bien sûr moi-même relativement teubé, et relativement peu éclairé, l’apprentissage de la pensée va dans les deux sens. Tous ça pour dire que selon moi la philosophie n’est pas un refuge pour oublier la réalité, mais un outil pour construire un monde moins stupide et moins absurde.
    • Philosophie et élitisme (suite) 27 mars 2007 13:52, par no
      La philosophie ne suffit pas à aller vers quelque chose de mieux à comme tu dis "construire un monde moins stupide et moins absurde", que ce soit politiquement ou économiquement , ou d’une toute autre manière.Ce que tu dis est déjà porteur de présupposés, ou tout du moins de principes .Le problème de la philosophie est qu’elle peut justifier beaucoup de choses que moi je considère comme inacceptable.Peut être est ce en tant que femme que je pense cela.En effet, Kant n’a pas écrit pour moi, il n’était pas pensable pour lui que des femmes fassent des études supérieures, qu’elles pensent et s’interrogent. Ce n’est que dans une philosophie extrèmement récente que l’on trouve des interrogations sur le statut de la femme dans la pensée. Il ne faut pas oublier que la pensée dominante est une pensée masculine hétérosexuel, et que cela n’a pas été transformé par la philo mais qu’au contraire , elle l’a institutionnalisée
      • Philosophie et élitisme (suite) 28 mars 2007 03:14, par jean-marc

        Ton point de vue est parfaitement défendable. Il est on ne peut plus vrai que l’histoire de la philosophie est largement sexiste, machiste, phallocrate, hétérosexiste (on peut rajouter bourgeoise il me semble, le niveau de vie des auteurs comme de leurs lecteurs n’est pas celui de n’importe qui, dans l’immense majorité des cas). Que les écrits des philosophes aient permis de valider ce genre de regrettables idées qui sont d’ailleurs loin d’être écartées aujourd’hui, voila qui est incontestable.

        A présent, je voudrais te demander au nom de quoi tu considères ces positions comme inacceptables. Tu dis que la philo "ne suffit pas", c’est donc en vertu d’autres principes que des principes "philosophiques" que tu considères le machisme comme révoltant. Je peux concevoir qu’on souffre d’un sytème social qui nous opprime, et qu’il n’y a pas besoin d’avoir fait de philo pour cela. Mais il est également vrai que la prise de conscience que l’on est opprimé ne vient pas du simple fait d’être opprimé : l’exemple du machisme en est il me semble un bon exemple. Les luttes féministes ont beau être très anciennes (aristophane à ma connaissance) et très répandues aujourd’hui, un très grand nombre de femmes considère leur situation comme naturelle, légitime, etc. A mon avis, c’est une philosophie, une certaine conception de la dignitié humaine, des droits de l’Homme (encore un machisme de la langue...), bref, c’est une certaine éducation qui permet aux femmes (et aux hommes, on n’est pas des brutes irrécupérables), de prendre conscience de la domination masculine de nos sociétés sur les femmes.

        J’ai repris ton exemple mais on pourrait je crois faire le même constat en ce qui concerne les autres formes d’injustice dont la philo a été (et continue à être)vle véhicule.

        Les écrits philosophiques sont capables du meilleur comme du pire, comme n’importe quelle action des humains. Je ne crois pas une seconde que dès lors qu’on s’occupe de philosophie, tout ce que l’on dit ou fait sera nécessairement moral et vrai... L’histoire de la philo est remplie d’erreurs. Mais ce qui nous permet de dire que ce sont des erreurs, je veux dire, ce qui nous permet de dire que ces idées sont scandaleuses, ce n’est rien d’autre qu’une conception philosophique. L’histoire de la philosophie n’est pas un tout simple mais un corpus traversé par tout un tas de contradictions.

        Comment faire le tri entre toutes ces idées pour en dégager les bonnes ? C’est là qu’on sort de la simple histoire la philosophie pour faire de la philosophie, au sens plein du terme, c’est à dire ne pas se limiter à lire les philosophes pour savoir ce qu’ils ont pensé (auquel cas effectivement on serait forcé d’appeler du même nom de philosophie la validation aristotélicienne de l’esclavage, que sa dénonciation par Montesquieu, on serait obligé d’interpréter la quasi inexistence de femmes philosophes dans l’histoire comme une incompatibilité entre les deux), pour s’occuper d’éprouver la vérité de ces conceptions passées.

        Comment le fait-on ? selon moi, par la logique (tel énoncé est contradictoire avec tel principe), et par la confrontation à notre expérience. Alors on retombe sur ce dont je parlais au début, c’est à dire la possibilité de ressentir dans notre vie concrète l’inadéquation de tel principe philosophique. Tu dis que la philosophie a justifié des positions machistes etc. Si tu veux dire que les philosophes ont souvent argumenté en faveur de l’infériorité de la femme, tu as raison. Mais moi je ne trouve pas qu’ils l’ont justifiée ! Je ne suis nullement convaincu de leurs raisons et les trouve mauvaises.

        Effectivement étudier l’histoire de la philosophie ne suffit pas, il faut pratiquer la philosophie, et si tu as lu un peu mes autres commentaires sur ce site, tu dois être habituée à ce genre de position de ma part...

        Il s’agit juste de s’entendre sur les termes. Je n’appelle pas philosophie au sens plein du mot le corpus de textes des philosophes. Cela constitue l’histoire de la pensée, une culture si l’on veut. La philo, c’est lorsqu’une théorie surgit de notre expérience directe, ou lorsqu’on confronte une théorie héritée à notre expérience.

        Si la domination masculine ne te fait pas seulement chier en tant que femme, mais que tu la trouves injuste en soi, tu fais une théorie, tu fais de la philo à mon sens. Donc nous sommes d’accord. Heureux d’avoir pu nous entendre aussi rapidement !

        A propos, l’idée traîne de faire un dossier spécial de la pholie chronique sur "la femme" ou "la féminité", ou "la femme et la philosophie". ça peut t’intéresser, et ça nous intéresse si tu es intéressée. Désolé de te réduire à une féministe, mais c’est la seule facette que tu nous laisses voir de toi pour l’instant...

  • Philosophie et élitisme (suite)

    2 février 2007 18:52, par morgane

    Je ne considère pas la philosophie comme un refuge, je parlais de bureau à tiroirs en pensant à Baudelaire. Le bureau c’est mon crâne. Il se trouve que j’essaie de ne pas en faire un paradis artificiel, précisément.

    "Pour moi, développer la philosophie, et au-delà, l’intelligence, la culture, la tolérance, la prudence intellectuelle (sic), ce n’est pas une action de bienfaisance ou de fierté, mais une question de vie ou de mort."

    un rêve de ce genre là. Je crois pas à ce meilleur des mondes fait de prudence intellectuelle, de tolérance et de culture. Ca pue la douceur et la demi mesure ton monde idéal, où tous les gentils votants iraient préserver leur bonheur etriqué et leur avenir inquiet dans le statu quo apathique de la betise democratique. Je ne veux pas construire un monde moins absurde, je veux vivre dans ce monde la, absurde et alors ? Pour moi, la philosophie est une affaire de fierté, mais qui va dans les deux sens : c’est la moindre des choses, aussi je ne la considère pas comme la solution de tous mes maux. Mais je refuse d’admettre que je dépends des autres, pas d’autres personnes individuelles, ponctuelles, singulières, mais de tous les autres. Des personne.


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